La mort lui va si bien
En matière de notoriété, il en va des rappeurs comme des autres artistes musicaux : certains font la une des magazines, beaucoup restent dans un anonymat relatif. En langage hip-hop : mainstream versus underground.
La mort, surtout si elle est soudaine, change la donne. Elle permet de passer d’un statut à l’autre à la vitesse d’une rubrique nécrologique. Il en va ainsi d’un rappeur dont les enregistrements n’ont jamais vraiment affolé les compteurs des maisons de disque mais qui s’était constitué au fils des ans une solide fan-base. Son talent indéniable pour jouer avec les sonorités lui ont toujours valu la reconnaissance de la critique sans pour autant attirer l’attention des médias généralistes. Sa mort survenue à l’improviste et annoncée 2 mois plus tard par sa femme, a pourtant fait l’objet d’articles dans des journaux - The Sun, Slate, CNN, Le Parisien, Closer, Paris Match - dont on ne soupçonnait pas l’intérêt pour le genre de rap produit par Daniel Dumile, un son souvent complexe ou oppressant sur des paroles tirées de comics américains et mélangées à des citations métaphysiques visant l’impact sonore plutôt qu’un sens explicite.
Que lui vaut cet engouement médiatique posthume ? Est-ce dû au caractère énigmatique du personnage, multipliant les identités artistiques ( il se nommait tour à tour Zev Love X, MF Doom, King Geedorah, Metal Fingers, Viktor Vaughn ), précurseur dans le port du masque, un accessoire devenu aujourd’hui très à la mode et inspiré par le personnage de BD Doctor Doom qu’il ne quittera jamais ? Ou bien est-ce que le destin tragique d’un fils d’immigrés afro-antillais, ayant affronté jeune adulte la mort d’un frère puis celle d’un fils une fois père de famille, connu des années d’errance alimentées par la drogue et l’alcool, forcé de quitter les États-Unis après y avoir passé l’essentiel de son existence, apparait plus clairement lorsque l’âme s’est envolée ?
Après tout peu importe. Mc DvD revisite la discographie du lascar, que ce soit en solo ou au cours de ses nombreuses collaborations avec des poids lourds du secteur ( Madlib, Danger Mouse, Gorillaz, Flying Lotus, Ghostface Killah, The Herbaliser... ).
R.I.P.