Sexe, violence et fric
Bartók encore.
El Rozé n’en finit plus de revisiter l’œuvre du compositeur hongrois. Après le Quatuor à cordes n°4 et la Sonate pour 2 pianos et percussions, il nous propose ici d’écouter un ballet-pantomime en un acte composé en 1918-19 sur un livret de Menyhért Lengyel d’après un conte chinois.
Au cas où vous ne le sauriez pas, le ballet-pantomime ou ballet d’action est un spectacle chorégraphique narratif, dont l’histoire est développée à l’aide de la danse et de la pantomime. Un genre inauguré par Don Juan, ou le Festin de Pierre (1761) de Gluck. Censuré à sa sortie pour ses connotations trop érotiques, Bartok transforma sa musique en une suite pour orchestre symphonique et une adaptation pour deux pianos.
Composé entre la fin de la première guerre mondiale et la crise de 29, le ballet de Bartók alterne phases lascives, inquiétantes et frénétiques, voire obsessionnelles, ce qui lui vaudra d’être classé à la fois dans le genre expressionniste et impressionniste. Bref, inclassable.
L’intrigue :
Devant une maison louche des bas-quartiers d’une ville sordide et chaotique, une prostituée attire les passants vers trois mauvais garçons qui les dévalisent. Deux quidams sans le sou, un vieux beau et un jeune timide, sont refoulés par les voyous. Arrive un riche mandarin, pigeon idéal, qui se laisse séduire par une danse lascive, une chasse voluptueuse. À trois reprises, par étouffement, coups de poignard et strangulation, les truands essaient d’assassiner le Chinois, mais, bien que blessé, il semble immortel. Apitoyée, la prostituée chasse ses comparses et s’abandonne dans les bras du mandarin qui, son désir assouvi, succombe à ses plaies. Dans la suite pour orchestre, l’histoire prend fin avant la mort du mandarin.
The Miraculous Mandarin (le mandarin merveilleux), BB 82, Sz. 73, (op. 19) 1918-1924
János Sándor (direction), Hungarian State Opera Chorus, Budapest Philharmonic Orchestra
Enreg. 1967
Hungaroton HCD41002